lunedì 4 marzo 2013

Jacques Attali: De quoi Beppe Grillo est-il le nom ? @ L'Express, 4 mars 2013



Non, Beppe Grillo  n’est pas Coluche. Michel Colucci n’aurait jamais soutenu que le « sida est la plus grande farce du siècle « ,  inventée par l’occident, niant qu’il  est un virus transmissible. Ni prétendu  sans la moindre preuve, qu’une respectée lauréate italienne  du prix Nobel de médecine, Rita Levi-Montalcini,  avait obtenu son prix en faisant corrompre le jury par une firme pharmaceutique. Il n’aurait pas expliqué que  les tests de diagnostic précoce du cancer sont dangereux, ni  que l’informatique est l’invention du diable. Il n’aurait pas non plus renvoyé dos à dos un parti de droite dirigé par un homme d’affaires beau parleur et corrompu, propriétaire de l’essentiel des médias du pays, qui a déjà, en la dirigeant,  conduit l’Italie à la ruine,  et un parti de centre gauche, dirigé par un homme honorable mais sans charisme, au programme honnête et lucide.
Si un quart des Italiens ont voté pour lui, ce n’est évidemment pas pour soutenir de telles stupidités. Mais juste pour dire qu’ils en ont assez de voir la vieille  classe politique refuser de laisser la place à des jeunes de talent. Et ils existent, tel le jeune maire de Florence, battu dans des primaires incertaines d’une gauche aussi conservatrice que la droite.
C’est aussi parce que les Italiens n’ont vu de la politique de Mario Monti que la pilule amère à avaler sans avoir eu le temps de juger de l’impact qu’auront à terme les quelques réformes de structures qu’il a initié.
C’est aussi, et sans doute surtout, parce que les citoyens, en Italie et ailleurs, en ont assez de voir les hommes politiques manquer de courage et ne pas leur dire la vérité.
Et la vérité est très simple : Dans le monde qui vient, qui aura bientôt 9 milliards d’habitants, avides d’apprendre,  de produire, de créer et de consommer, nos vieilles nations d’Europe ne pourront conserver leur formidable niveau de vie qu’à condition de choisir clairement entre deux stratégies: se replier sur des cités-états  fermées sur elles-mêmes, et abandonnant leur environnement au déclin,  ou se regrouper en une vraie puissance européenne, politiquement unie,  de la taille des grandes nations-continents de demain.
Pour cela, il faut prendre acte de ce que le nécessaire désendettement passe autant par la croissance que par la rigueur. Que la rigueur seule aggrave la dette ;  que l’euro ne peut-être le simple prétexte d’une austérité qui ne mène  à rien, sinon au chômage de masse ;  que sans réforme institutionnelle majeure, lui donnant les moyens de la croissance, toute l’eurozone aura bientôt le statut de la Grèce, et  qu’il lui faudra  alors  renégocier avec ses  créanciers, dans des conditions extrêmement pénibles.
Au total,  la croissance suppose une politique volontariste que seul peut décider une nation-continent ou une cité-état. Etre la Chine ou Singapour. Etre Venise ou les Etats-Unis d’Europe.
Voilà ce que signifie cette montée d’un populisme incertain. Elle constitue un appel  à la décision. Si les démocraties n’en sont pas capables, elles seront balayées par des gouvernements autoritaires, qui décideront, et  prendront au pied de la lettre les propositions de Grillo et de ses semblables.
Il n’y a plus de place pour les demi-mesures. Les faux semblants.
Tout petit. Ou très grand. Il faut choisir. Et vite.
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What does the name Beppe Grillo stand for?

March 4, 2013 5:49 P.M | by JACQUES ATTALI
No, Beppe Grillo is not Coluche. Michel Colucci would never have argued that
« AIDS is the greatest hoax of the century », made up by the West, denying the
fact that it is a transmissible virus. Neither would have claimed without
any proof, that a respected Italian neurologist who won a Nobel Medicine
Prize, Rita Levi Montalcini, had received her Prize by having the jury
corrupted by a pharmaceutical firm. He would not have said that tests for
the early diagnosis of cancer are dangerous, or that information technology
is the invention of the devil. He would not have dismissed both a right-wing
party run by a businessman, smooth talker and corrupt, owner of the major
part of the national media, who has before dragged Italy to the bottom by
leading the country, and a left-wing party, led by an honorable man but with
no charisma, having an honest and lucid program.
If a quarter of Italians voted for him, this is not, of course, to support
such nonsense. But just to say that they are tired of seeing the old
political class refuse to make room for talented youth.
And they exist, such is the case concerning a young mayor in Florence,
defeated in uncertain primaries of a left as conservative as the right. It
is also because the Italians have only seen from the politics of Mario Monti
the bitter pill to swallow without having had time to judge the impact over
time of the few structural reforms that he has initiated.
It is also, and probably most importantly, because citizens, in Italy and
elsewhere, are sick and tired of seeing politicians lack courage and not
tell them the truth.
And the truth is very simple: in the world to come, which will soon reach 9
billion people, eager to learn, produce, create and consume, our old
European nations will not be able to maintain their monumental standard of
living but if a clear choice between two strategies is made: withdraw into
city-states closed off and inward looking, while letting their environment
bleed, or merge into a true European power, politically united, the size of
the large nation-continents of tomorrow.
For this to happen, one needs to be aware of the fact that the necessary
deleveraging has to do as much with growth as rigour. That rigour alone
worsens debt; that the euro cannot be the mere pretext of an austerity that
leads to nothing, but mass unemployment; that without major institutional
reform, giving it the resources for growth, the entire eurozone will soon
have the status of Greece, and then it will have to renegotiate with its
creditors, in extremely harsh conditions.
Overall, growth requires a proactive policy that only a continent-nation or
a city-state can decide. Being China or Singapore. Being Venice or the
United States of Europe.
This is what this rise of uncertain populism means. It represents a call to
action. If democracies do not rise to the occasion, they will be swept away
by authoritarian governments, who will decide, and take at face value the
proposals of Grillo and those like him.
There is no longer room for half-measures. Deceptions.
Tiny. Or huge. We must choose. And quickly.
j@attali.com

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